La rubrique ici présente vise à lister l’ensembles des actes discriminatoires recueillis auprès des personnes victimes de discriminations lors de leur entretien d’embauche ou d’un dépôt de candidature à une offre d’emploi.
1 – Offre infructueuse
De nombreux témoignages nous relatent une pratique courante consistant à rendre infructueuse une offre d’emploi faute, selon l’employeur ou le cabinet de recrutement, de candidats adéquats.
Or le constat fait par l’association est que nombres de ces offres auraient pu être pourvu au vu des candidatures présentées empêchant par la même des personnes à la recherche d’un emploi ou désireux de se reconvertir de pouvoir le faire, les maintenant ainsi dans des situations parfois précaires.
La problématique est que si l’employeur peut parfois se permettre d’attendre pour sélectionner un candidat, les demandeurs d’emploi ayant parfois des familles à charge n’ont pas forcément ce luxe.
Il convient de rappeler que les périodes d’essai et les CDD visent à confirmer ou non le choix d’un candidat sur le poste proposé.
Il apparaît également, malheureusement, que certaines de ces offres rendues infructueuses le serait pour motif discriminatoire, l’employeur ne souhaitant pas embaucher par exemple un natif ou préférant l’embauche d’une femme ou d’une personne d’une certaine origine.
Il apparaît également que certaines offres d’emplois bien que supposées vacantes, autrement libres d’accès, soient en réalité déjà pourvues et destinées à un candidat déjà choisi par l’employeur mais qui à la dernière minute n’ayant pu occuper le poste pour des motifs personnels amène l’employeur à classer l’offre infructueuse alors que d’autres personnes avaient candidaté.
Certaines de ces offres se retrouvent ainsi plusieurs fois publiés donnant aux candidats potentiellement exigibles un sentiment d’amertume du fait de ne pas avoir été retenu voir parfois de ne pas avoir eu même ne serait-ce qu’un entretien.
Si les employeurs ont aujourd’hui l’obligation de publier leurs offres d’emploi, malheureusement aucun contrôle n’existe après cette phase de publication.
C’est pourquoi, l’association milite pour une obligation de contrôler celles-ci comme le demande les membres des CPEL.
2 – Tests psychologiques
Bien qu’ayant été interdit par le passé par le code du travail de Nouvelle-Calédonie, le recours a des tests psychologiques, graphologiques, … semble aujourd’hui très usités par certains employeurs et cabinets de recrutements.
Il convient de rappeler que si des tests d’aptitude peuvent être demandés auprès des candidats souhaitant postuler à un poste, ceux-ci doivent avoir un lien direct avec les fonctions du dits postes.
Le recours, notamment, à l’astrologie, la graphologie ou la numérologie est interdit, sauf justifications pertinentes comme le rappel le site officiel de l’administration française.1
En France métropolitaine, ces tests sont en partie encadrés par la nouvelle loi travail (loi El-Khomri)2, qui obligent les employeurs et cabinets de recrutements à :
– informer les candidats de l’utilisation de ces tests et du type de test retenu,
Le test peut alors être stipulé dans l’annonce, être mentionné à l’oral avant le rendez-vous ou par mail dans la convocation d’entretien.
– d’avoir le consentement du candidat,
– recueillir des informations pertinentes et en lien direct avec le poste en question,
– garantir aux candidats que les résultats du test sont confidentiels,
– communiquer au candidat qui le souhaite le résultats du dit test,
– supprimer le résultat des tests à l’issu du processus de recrutement.
Or, au vu des témoignages recueillis par l’association la pratique en est tout autre. Non encadrés localement, ces tests n’apparaissent pas dans la publication des offres d’emploi. Les candidats sont informés parfois le jour même de l’entretien d’embauche. Tout refus de se soumettre à ces tests équivaut à un rejet de la candidature par l’employeur. Les tests parfois psychologiques voir graphologiques n’ont généralement aucun lien avec le poste proposé. Les résultats ne sont dans la majorité des cas jamais transmis au candidat.
Il apparaît même selon certaines études que ces tests véhiculent de nombreux biais de discriminations3.
Pour l’association, seules les informations transmises sur le CV, à savoir les formations diplômantes ainsi que l’expérience professionnelle devrait avec l’entretien oral du candidat servir de base au recrutement. Les tests devant être proscrits faute de transparence et de formations de la part des personnes les faisant passés.
3 – Préférences ethniques
Bien que l’embauche ou le rejet d’une candidature en fonction de l’origine de l’individu soit formellement interdit non seulement par le code du travail mais également par le code pénal, des témoignages recueillis par l’association semble indiqué le contraire.
Une personne nous a signalé ne pas avoir été embauché car l’entreprise lui aurait stipulé qu’elle avait atteint “son quota d’autochtone”.
Certains patrons lors de repas privés ont fait savoir qu’ils n’embaucheraient jamais de locaux.
S’il existe une préférence pour l’embauche de métropolitains notamment sur les postes de cadres supérieures, court-circuitant les diplômes locaux et se demandant à quoi sert l’université de Nouvelle-Calédonie, il convient de noter également une discrimination propre à la Nouvelle-Calédonie liée à la notion de rééquilibrage en faveur du peuple premier.
Cette dernière bien que compréhensible peut néanmoins s’avérer problématique quand postule sur un même poste 2 personnes natives dont l’une issue du peuple premier et que cette dernière moins compétente se trouve toute de même embauchée vis-à-vis de l’autre.
4 – Préférence féminine
Tout comme la discrimination liée à l’origine ou à la couleur de peau, celle liée au genre (sexe) de la personne est aussi prohibée par la loi.
Cependant, il s’avère que les femmes sont parfois plus recherchées que les hommes car jugées plus dociles et moins à même d’être à la source de potentiels conflits au sein de l’entreprise, même si l’entreprise ne respecte pas leurs droits.
5 – Offre truquée
A l’inverse de la France métropolitaine où depuis 2005, l’employeur n’a plus l’obligation de publier son offre d’emploi à Pôle Emploi, en Nouvelle-Calédonie, le dépôt des offres d’emploi demeure une obligation légale, pour toutes les offres d’emploi, sans condition de durée4. Le non-respect de cet article est passible d’une sanction administrative.
La problématique est que certaines d’entre elles ne sont pas publiées sur le territoire mais sur des plateformes basées à l’extérieur du pays, les rendant inaccessibles à certains natifs et à l’inverse plus accessibles pour les non natifs.
Autre point d’achoppement, certaines de ces offres sont pourvues avant même leurs publications. Des candidats ayant postulé quasiment le lendemain de publications parus sur le caillou nous ont témoigné des réponses faites par les entreprises leur stipulant qu’ils avaient déjà pourvu le poste.
A ce titre, certaines offres sont rédigées en conséquence, à savoir en fonction du CV du candidat voulue par l’entreprise.
Certains profils de poste mentionnés dans les offres sont également exagérés quant aux compétences recherchés afin d’être sûr qu’aucun candidats locaux ne puissent postuler et faire appel ainsi à la main d’œuvre extérieure. Si jamais un candidat natif venait toutefois à correspondre au profil, l’offre est rendue infructueuse.
6 – Réponse inexistante
Après avoir déposé une offre de candidature, il apparaît que certaines personnes ne reçoivent jamais de réponse de la part de l’entreprise ayant proposé le poste.
7 – Délais trop longs
Si dans le secteur privé, les prises de décisions peuvent être rapides, dans le secteur public il faut compter au minimum entre 1 et 2 mois en vue d’une éventuelle réponse.
L’association estime ces délais trop longs.
8 – Handicapés délaissés
Bien que des aides et des obligations réglementaires existent en vue de faciliter l’embauche de personnes en situation de handicap, la majeure partie des entreprises préfèrent payer des amendes5 plutôt que d’embaucher des handicapés.
En novembre 2023, sur 4341 calédoniens reconnus comme handicapés seulement 532 d’entre eux ont accès à l’emploi. Le pire étant que l’administration qui devrait montrer l’exemple, embauche moins que le secteur privé avec 204 handicapés employés contre 328 dans le privé6.
9 – Réglementation non respectée
Un autre domaine ou l’administration ne respecte pas ses propres règles consiste à éviter de recruter sur titre (sur diplômes), les personnes désireuses d’intégrer la fonction publique afin d’éviter d’en faire des fonctionnaires à vie. L’administration préférant les embaucher en tant que contractuel, c’est à dire sur la base de contrat à durée déterminée, potentiellement renouvelable et potentiellement transformable en CDI, mais pas en tant que fonctionnaire.
Pour rappel, les contractuels étaient dans la fonction publique en 2021 plus nombreux que les fonctionnaires à savoir 13000 contre 100007.
Face à cette situation, l’association aimerait que l’administration face preuve de plus de clarté et d’honnêteté sur son souhait de supprimer le statut de fonctionnaire afin que les candidats pouvant être recruter sur titre et par la même devenir fonctionnaire ne soient plus recalés lors de leurs entretiens d’embauche du fait de préférer pour l’employeur l’embauche de contractuels.
La réforme de la fonction publique de Nouvelle-Calédonie de 2021 semble aller dans ce sens avec la possibilité d’embaucher directement, non plus en tant que fonctionnaires mais en CDI des personnes souhaitant intégrer l’administration.
10 – Préférence patentés
Bien que déposant des offres d’emplois à la recherche de salariés, certains employeurs n’hésitent pas à changer les termes de l’offre durant l’entretien avec le candidat afin de l’orienter à prendre une patente et ainsi ne pas avoir à payer de charges patronales. C’est ce qui est appelé du salariat déguisé.
Cette situation a amené la Caisse d’Allocations Familiales et des Accidents du Travail (CAFAT) a augmenter ses contrôles sur la manière dont sont employé les travailleurs indépendants (patentés) avant la crise covid8.
11 – Intitulé changé
D’autres employeurs n’hésitent pas à changer à la dernière minute lors de l’entretien d’embauche l’intitulé du poste et ses fonctions.
Le témoignage d’un candidat ayant postulé sur une offre de cadre supérieur s’est vu proposé à la place par exemple lors de l’entretien le poste d’animateur éducatif avec de fait une proposition salariale totalement différente.
Le changement dans l’intitulé du poste relève souvent de l’offre truquée énumérée ci-avant et vise à décourager le candidat natif dans la mesure où une autre personne parfois non native a déjà été choisie sur le poste avant même sa publication.
12 – Diplômes dénigrés
Située en 2013, dans le bas du classement des meilleurs universités françaises9, l’Université de la Nouvelle-Calédonie (UNC) et par conséquent ses diplômes sont régulièrement dénigrés par les employeurs qui bien que demandant dans leurs offres d’emplois de connaître le contexte local préfèrent embauchés des personnes avec des diplômes métropolitains ou à consonnance anglo-saxonne.
Des témoignages de natifs ayant obtenu un diplôme de l’UNC nous ont stipulé n’avoir jamais décroché d’emplois grâce à celui-ci. Ces mêmes personnes ayant eu la possibilité financière de quitter le territoire pour compléter leur formation, ont parfois avec une seule année passé dans une université ou une grande école métropolitaine réussi de retour au pays à obtenir un emploi.
Certaines promotions de type bac+2 ont vu la quasi totalité de leurs étudiants occupés un poste une fois sur le marché du travail dans un secteur complètement différent à leurs formations initiales et à leurs niveau.
Ce déni des formations locales amènent certains employeurs aussi bien public que privé à proposer aux natifs des postes en deçà de leurs niveaux et de leurs qualifications.
Un grand nombre de diplômés des cadres techniques se retrouvent aujourd’hui à devoir quitter la Nouvelle-Calédonie ou à se réorienter dans l’enseignement afin d’occuper un poste alors que les postes techniques sont attribués à des non natifs.
1 Candidat à une offre d’emploi : méthodes de recrutement autorisées | Service-Public.fr
2 Article L1221-6 section 2 et L1221-8
4 article Lp. 432-3-1 du code du travail de la Nouvelle-Calédonie
5 Emploi et handicap : de nouveaux dispositifs de soutien – Nouvelle-Calédonie la 1ère (francetvinfo.fr)
6 La longue marche des travailleurs handicapés calédoniens – Nouvelle-Calédonie la 1ère (francetvinfo.fr)
9 Le classement des meilleures universités françaises – Le Figaro Etudiant Les universités d’Outre-mer à la traîne – Nouvelle-Calédonie la 1ère (francetvinfo.fr)